Auteur : Gabriel Noël, M. Env.
Conseiller en Mobilisation

 

Nous entrons dans une nouvelle aire des déplacements en ville. Si vous ne l’avez pas encore remarqué, voici 10 raisons qui vont vous convaincre que la mobilité du futur n’appartiendra pas aux voitures électriques.  

1 – Réduction des émissions du secteur du transport 

L’urgence climatique est déclarée depuis 2019 au Canada. L’effort le plus urgent est de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) afin d’éviter une catastrophe irréversible. Selon Environnement Canada, le secteur des transports est le deuxième plus important émetteur, avec comme principaux émetteurs les camions et les voitures.  

Durant les trente dernières années, d’énormes progrès ont été faits sur le rendement énergétique des véhicules. Malgré cela, les émissions de GES dues aux véhicules personnels ont augmenté de 12 % durant la même période, causées par l’augmentation total du nombre de véhicule et la popularité grandissante des véhicules plus polluant. En effet, les émissions provenant des voitures ont diminué de 40 %, alors que celles des camions légers (véhicules utilitaires sport, camionnettes et fourgonnettes) ont plus que doublé !  

Heureusement, agir sur le transport personnel est facile ! La majorité des trajets réalisés en voiture sont des trajets courts qui pourraient être faits en transport actif ou collectif. Quelles soient à carburant ou électriques, les voitures sont de grosses machines qui ont un impact environnemental considérable à la fabrication et lorsqu’elles roulent; en plus de nécessiter beaucoup d’entretien. En considérant seulement la fabrication et l’entretien, un vélo à assistance électrique (VAE) aurait seulement 1/10 de l’impact environnemental d’une voiture électrique. Comme l’urgence climatique demande de réduire drastiquement nos émissions de GES, l’adoption du VAE en milieu urbain est une solution de premier plan. 

2 – Fin de l’étalement urbain 

La culture de l’auto a un impact encore plus important que les émissions de GES : l’étalement urbain. En prévoyant l’aménagement du territoire en fonction des voitures, la ville empiète de plus en plus sur les milieux agricoles nécessaires à une alimentation locale et abordable. Pire, elle empiète sur des milieux naturels qui nous offrent d’innombrables services impossibles à remplacer (prévention d’inondation, filtration de l’air, pollinisation, etc.). Enfin, que dire de l’effritement du tissu social s’il n’y a pas de rues où se rencontrer ou d’économie locale à développer ? 

La planification d’une urbanisation plus dense et pensée en fonction de trajets plus courts nous permettrait de créer des centre-villages dynamiques, d’avoir des rues plus sécuritaires, de profiter de plus d’espaces verts, de recevoir plus de services à moindre coût et d’avoir un impact environnemental collectif beaucoup plus petit.  

3- Réalité sur le plus grand frein au vélo : la sécurité 

La sécurité à vélo, c’est ce qui retient le plus grand nombre de personne d’en faire. La peur des voitures, la peur des piétons, et la peur des autres cyclistes. On ne se sent pas autant chez soi sur la route à vélo qu’en auto, bien que ce soit un espace partagé. Est-ce une peur fondée? Que pouvons-nous faire pour éviter le pire?  

Des études de la Société de l’Assurance automobile du Québec (SAAQ) et de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) montrent que les cyclistes ne sont pas les principales victimes des accidents graves ou mortels sur les routes québécoises. Ce sont plutôt les autres automobilistes, les motocyclistes ou les piétons qui ont le plus de risques d’avoir des accidents graves avec des automobiles. Lorsqu’on compare avec d’autres pratiques sportives, il est en fait aussi risqué de faire du vélo que de faire du golf ou de la randonnée.  

Blessés graves et décès dans des accidents de la route en 2020 (SAAQ, 2021) 

nombre d'accidents graves sur la route par année au Québec avec les voitures 812 avec autre voiture 263 avec moto 216 avec piétons 84 avec cyclistes

Taux de blessures par 1000 pratiquants en 2015-2016 (INSPQ, 2019)  

accidents graves par sport par année au québec 8 nge 20 golf 21 marche 23 vélo 51 ski 53 entrainement 65 course 93 boxe 101 hockey

Pour s’assurer que les risques d’accident restent minces, il faut savoir comment se comporter sur la route. Les cinq points les plus importants sont :  

  • Rester visible (couleurs vives, réflecteurs, lumières) 
  • Être prévisible (indiquer nos intentions, sonner pour dépasser) 
  • Prendre son temps (garder ses distances, prendre sa place) 
  • Resté à l’affut de son environnement 
  • Cohabiter avec courtoisie 

Pour aller plus loin, il existe plusieurs sources d’information sur la sécurité en vélo offertes aux enfants et aux adultes : le site Partage la route, le programme Cycliste averti, le Guide de sécurité à vélo de la SAAQ et les formations du Rack à Bécik 

Bien que les infrastructures disponibles ne soient pas parfaites, nous sommes gâtés à Gatineau. La ville a un ambitieux Plan directeur du réseau cyclable depuis 2018 qui dessert les zones les plus habitées et avec le plus de potentiel pour les trajets à vélo. La ville a même obtenu la certification Vélo Sympathique en 2016 et 2020. 

  • 300 km de liens cyclables 
  • 2,5 km de pistes déneigées l’hiver, dont le pont du Portage 
  • 5 stations de réparation de bicyclettes  
  • 2 enclos couverts dans les parcs 
  • Des supports sur les autobus de la STO 
  • Un projet pilote de « réseau blanc » pour damer la piste cyclable du Rapibus et permettre aux cyclistes d’y circuler 12 mois par année 

Pour bien planifier son trajet, rien de plus simple que d’utiliser votre application de transport préférée. Si vous préférez élaborer un trajet par vous-même, vous pouvez consulter la carte du réseau cyclable 

4- Grosses économies  

Acheter une voiture à essence ou une voiture électrique coûte très cher quand on les compare à un VAE. Bien que le VAE ne peut parcourir des centaines de kilomètres en quelques heures, il peut être jumelé à d’autres moyens de transport comme l’autobus, le train ou la voiture partagée.  

L’entretien d’un vélo est minime et coute environ une centaine de dollar par année. Un bon vélo n’a d’ailleurs techniquement pas de fin de vie. On trouve encore des vélos des années 1970 en très bon état sur le marché de seconde main. Il faut seulement s’assurer de faire un entretien annuel et de changer quelques pièces de temps à autres lorsque le mécanicien le recommande. 

 Amusons-nous un peu et comparons combien coutera le transport d’un couple pour une période de 5 ans. Les données viennent de mon expérience personnelle pour les VAE et du calculateur des coûts de conduite de CAA pour les voitures. 

Il faut aussi considérer que les usagers de VAE ont tendance à l’utiliser plus souvent qu’un vélo conventionnel ou qu’une voiture partagée, simplement parce que c’est plus facile à utiliser. Peu d’effort, pas de réservation et pas de paiement à l’usage. Le kilométrage annuel en auto sera donc moins élevé pour des usagers de VAE que pour ceux qui ont toujours une voiture disponible. Sans compter que le prix du carburant va continuer d’augmenter 

5- Plus vite, plus loin, moins d’effort 

Il est beaucoup moins forçant de faire du vélo électrique que du vélo conventionnel. L’effort fait à plus basse vitesse, comme lors d’une montée ou d’une accélération initiale, est davantage fait par le moteur et la vitesse de croisière est atteinte plus rapidement. En moyenne, on devient un cycliste 2 fois plus efficace avec une assistance électrique.  

Graphique de l’effort réalisé par un cycliste assisté d’un moteur électrique en fonction de la vitesse 

6- Distance parcourable

Le cycliste utilitaire moyen de Gatineau fait 5 km le matin, un déplacement qui prend environ 20 minutes. Avec un VAE, il pourrait faire jusqu’à 9 km en 30 minutes. Le confort et l’efficacité de ce mode de transport encourage à l’utiliser plus souvent qu’un vélo conventionnel, car on peut facilement aller plus loin plus rapidement en faisant moins d’effort. Amener les enfants à la garderie ou aller faire l’épicerie n’est donc plus un gros obstacle.

7- Pas d’arrivée en sueur 

Faire un trajet à vélo, même court, peut mener à beaucoup de transpiration, surtout l’été. Ça peut être un inconvénient important si la destination n’a pas de douche ou qu’on n’a pas l’opportunité de changer de vêtements. Aménager une douche ou prévoir un vestiaire est un investissement que la majorité des lieux de travail ne sont pas prêt à faire. Heureusement, l’effort à faire sur un VAE est deux fois moins grand que sur un vélo conventionnel. Il est ainsi très rare qu’on arrive complètement trempe à destination, même après une longue distance. 

8- Géométrie accessible 

La majorité des modèles de VAE sont conçus pour un usage utilitaire urbain. Ils sont faciles à enfourcher près du sol, sans qu’on ait à lever la jambe. On y est assis confortablement et droit, ce qui offre une bonne visibilité latérale et une aisance à se retourner. Les roues sont souvent plus larges qu’un vélo de route, ce qui offre davantage de stabilité et qui permet de se déplacer sans crainte sur tout type de terrain. Un bon vélo comprendra également des garde-boues, des lumières et une sonnette. Nous aborderons d’ailleurs comment choisir un bon VAE dans un prochain article.  

2 bicyclettes électriques au lac avec deux personnes à l'arrière

9- Plus d’exercice, meilleure santé, sans perte de temps 

L’Agence de la santé publique du Canada reconnait le transport actif comme un des meilleurs moyens de faire de l’activité physique, car on peut en faire dans un moment que plusieurs considèrent comme perdu. Se transporter est inévitable et en voiture on ne peut pas faire autre chose que conduire. Après il faudra en plus prendre le temps de faire du sport pour se garder en santé! Le VAE peut ainsi être une excellente façon d’intégrer de l’activité physique à nos vies, car il permet d’ajuster le niveau d’assistance selon notre capacité. Vous verrez que vous ferez rapidement du progrès et que les bénéfices sont innombrables : perte de poids, plus d’énergie, réduction du stress, prévention des maladies chroniques (cancer, obésité, hypertension, maladie du cœur, diabète) et augmentation de la concentration et de la performance au travail.  

Une femme qui fait du vélo électrique

10- Faire partie du mouvement 

L’attachement à l’automobile n’est pas seulement une question utilitaire, il est émotif et symbolique; les voitures sont une culture ! Malheureusement, l’humain n’a pas tendance à aimer les changements, mêmes s’ils s’avèrent préférables. Convertir une partie d’une route en piste cyclable ou changer de mode de transport donne l’impression qu’on perd quelque chose. Notre défi collectif est de changer cette culture de prendre l’automobile pour tout et plutôt de l’utiliser lorsqu’elle est vraiment utile, comme lors de longs déplacements, de déplacements urgents ou du transport de charges volumineuses.  

N’oublions pas que la voiture électrique est loin d’être une panacée. Elle ne règle en rien les enjeux d’aménagement du territoire et, à part pour quelques endroits dans le monde, elle ne réduit pas du tout les émissions de gaz à effets de serre si l’électricité ne provient pas de sources renouvelables.  

La culture du vélo est certainement en vogue chez les plus athlétiques d’entre nous, mais la pratique courante du vélo reste difficile pour ceux qui n’ont pas la forme physique suffisante. Avec les VAE, il n’y a plus de barrière. Tout le monde peut maintenant se déplacer facilement, rapidement, à moindre coût et sans avoir un énorme impact environnemental.  

Bien que cette culture soit en plein essor, il faut encore convaincre les sceptiques. Équiterre offre une solution efficace avec son projet Vélo Volt. Des flottes de VAE ont été distribuées à des grandes entreprises aux quatre coins du Québec pour qu’elles soient prêtées à leurs employés. Les gens ont l’opportunité d’essayer un VAE pendant deux semaines pour tester tous leurs déplacements : vélo-boulot, épicerie, visites, sorties et même partir en voyage ! En Outaouais, les chanceux qui ont été choisis sont Brigil, le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais, la Société de Transport de l’Outaouais, la Ville de Gatineau et l’Université du Québec en Outaouais. Les vélos pourront aussi être essayés lors d’événements comme la Foire Écosphère de Gatineau les 18 et 19 juin 2022.  

Plusieurs villes ont emboité le pas en développant un maximum d’infrastructures cyclables sécuritaires (Victoria, Vancouver, Ottawa, Copenhague, Amsterdam, etc.). D’autres offrent carrément des flottes de VAE à leurs citoyens (Montréal, Vancouver, New York, Paris, Tel Aviv, etc.).  

En fait, il y a tellement d’avantages et tellement peu d’inconvénients que la culture des VAE se développe à une vitesse folle. Une révolution si importante qu’elle s’approche de celle des téléphones intelligents ou, similairement, la démocratisation de l’usage de l’automobile. L’occasion est si belle que MOBI-O pense acquérir sa propre flotte pour sa communauté. Pensez-vous que c’est une bonne idée ? Aimeriez-vous essayer un VAE pendant quelques semaines ? 

 

Liste des références

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